Je les ai regardé

Je les ai regardé

février 28, 2022 2 Par Naufrage en pleine Mère

Le regarder. Les regarder. Dormir, paisiblement. Calmement. Contre moi. Seul. Dans leurs lits ou ailleurs. Les admirer. 9 mois et les siestes, nuits ont été chaotiques. 9 mois, une coach sommeil, des rythmes. 9 mois et des réveils nocturnes a répétitions. Des siestes nulle part ailleurs que sur nos bras, dans nos bras. Ce matin là, après s’être réveillé à 5h15, et rendormi dans mes bras. Je les ai gardés tout près de moi, tout contre moi. Après des semaines à essayer de mettre en place l’endormissement autonome, j’ai juste voulu l’observer, le regarder, le sentir, l’entendre près de moi, dans mon lit, dans mes bras. Serein, il dormait si bien contre moi.

Je l’ai regardé. Vous allez me dire, mais c’est à ce moment qu’il faut dormir. Je n’ai pas réussi. J’aurai aimé, voulu. J’ai essayé mais le sommeil ne venait plus. Ce moment hors du temps. Cet instant flotté au dessus de moi, dans les airs. Ce moment je voulais le garder, le placarder au fond de ma mémoire, ne jamais l’oublier. Sa peau douce, sa respiration lente, sa succion, ses mains me tenant, son petit corps si chaud contre le mien. Mon tout petit.

Je l’ai regardé. Qui d’autre peut le regarder et le connaître autant que moi. Alors oui, avec l’épuisement parfois l’attention est moindre. Alors oui, il m’arrive de laisser tomber quand-même l’endormissement ne peut se faire dans leurs lits. Alors oui, j’abandonne. « Regarde les, ils sont complètement dépendant de toi, de tes bras. Regarde ce que tu en as fait. Ils sont et seront incapables de dormir seuls« , ces phrases trop souvent dites, entendues, qui blessent, qui remettent en doute, en cause ton rôle.

Oui, je les regarde. Personne ne les regarde comme je les regarde. Je les ai regardés sur toutes leurs echographies, de longues heures, en me disant que peut être on s’était trompés et qu’ils n’étaient peut être pas deux. Je les ai regardés sous tous les plis quand ils sont nés, 1fois, 10fois, 100 fois, 1000fois pour regarder encore si tout allait bien, leurs petits poids inquiétant, le RCIU de Léon. Je les ai regardés quand ils étaient inconsolables afin de trouver enfin un remède à leur peine, foutu RGO. Je les ai regardés pendant leurs deux premiers mois, à prendre mon sein, à y être accrochés, attachés littéralement. Je les ai regardés se retourner, attraper leur pieds, s’assoir, faire leurs dents, gazouiller, faire du quatre pattes, ramper, se tenir la main, rire tous les deux, se rassurer, ensemble. Je les ai regardés dormir ensemble, puis séparés. Je les ai regardés pour leurs premiers vaccins. Je l’ai regardé au kiné respiratoire pour sa bronchiolite. Je les ai regardé tout ce temps et bien plus encore. Alors d’accord, à ce moment là, j’ai dérogé à la règle, je ne l’ai pas reposé dans son lit, je ne l’ai pas laissé se rendormir seul. Maintenant il à pu dormir 1h de plus, près de moi, apaisé. Mais il s’en remettra, je vous le promet. Et bien plus vite que l’impact de ces mots sur moi. Parce que je n’ai jamais encore vu d’enfant, d’ado de 18ans dormir avec ses parents. Je n’ai pas toujours le temps de prendre le temps pour chacun, alors 1h dans ma journée, peut être que cela me fait un bien fou, peut être que cela m’aide à affronter les heures à venir. Peut être que je recommencerai demain avec son jumeau ou que finalement je m’autoriserai à dormir seule et un peu plus.

Mais je les regarderai encore, sous tout les angles avec mes yeux remplis d’amour pour eux. Parce que mon coeur s’est décuplé d’amour pour eux, mais que mes yeux sont partout, aguerris, avertis, inquiets, aimant, rassurant, culpabilisant parfois, tendre toujours.